PERPETA
Tous nos actes conditionnent notre avenir… C’est le Karma.
Ce matin, la neige est épaisse et blanche ; au sol comme sur les branches. Le soleil apparaît, faible lueur astrale et la nuit cède le pas à une aube bien pâle.
Aucun vent, pas un bruit ; l’air est comme suspendu dans cet univers froid et humide.
La pente neigeuse est bordée de chaque côté par la forêt, immaculée et brillante sous l’effet des premiers rayons du soleil.
Une ombre se détache soudain sous les frondaisons et le grand cerf apparaît dans la lumière du jour naissant. Ses poils retiennent le givre et de la vapeur sort de ses naseaux. Ses bois énormes lui confèrent une couronne imposante.
L’animal avance prudemment de deux pas, écoute et hume l’air glacé. Il attend un peu et avance encore. Il gratte le sol pour creuser la neige et baisse la tête en quête de quelques végétaux pour se nourrir.
De l’autre côté de la piste blanche, Duncan se tient debout contre un arbre; immobile et attentif. Il est posté là depuis des heures. Son souffle est filtré par son col et sa cagoule. Précautionneusement et lentement, il ôte ses moufles épaisses et les laisse pendre à sa ceinture, il sort délicatement une flèche de son carquois et la pose sur la corde de son arc. Son rythme cardiaque s’accélère un peu. Il n’aura droit qu’à un seul essai. Il pointe son bras en direction du cerf, tire sur la corde et vise instinctivement derrière l’épaule de l’animal. Il lâche la corde de l’arc et la flèche garnie d’une lame traverse l’air et disparaît en direction du cerf.
En entendant le discret claquement de la corde de l’arc, le cerf a immédiatement relevé la tête et au moment où il allait effectuer un bond pour disparaître dans la forêt, la flèche l’a traversé de part en part; perforant au passage un poumon et cisaillant son aorte. En guise de bond, il ne peut effectuer qu’un léger déplacement avant que ses pattes ne cèdent sous son propre poids, vidées de leur énergie. Le bel animal tremble et s’écroule ; abandonné par la vie.
Duncan a assisté silencieux à la mort fulgurante du cerf. Il s’empare maintenant de la corde du traîneau et traverse la piste. Ses jambes s’enfoncent assez profondément dans la neige épaisse.
Il doit faire vite… Il charge sa proie sur le traîneau et l’amarre avant d’entamer la descente vers la vallée.
Duncan sait que les quelques gouttes de sang qui perlent sur le corps de l’animal, comme celles qui sont tombées sur la neige, sont un signal puissant pour les loups. Même si le cerf n’a pas poussé de cri.
Il doit quitter l’endroit le plus rapidement possible avant que la meute n’arrive tous crocs dehors pour lui dérober sa prise et lui prendre sa propre vie. D’autres avant lui ont connu ce sort funeste. Les loups ici sont très rapides et leur odorat est surdéveloppé. Quant à leur taille et leurs crocs… Des monstres !
Le chasseur entame sa descente assis à l’avant du traîneau en s’aidant au début de ses pieds pour se diriger. Il file maintenant à bonne allure. Son traîneau est solide; fait de bric et de broc ; à moitié en métal, le reste en bois, il est équipé d’un grand grappin aux pattes larges, d’un rétroviseur et de deux dérives à l’arrière qu’il peut orienter pour tourner à grande vitesse.
Il doit descendre jusqu’en bas de la piste et pour cela, il lui faut négocier un grand virage, éviter un groupe de rochers et stopper net à l’aide du grappin. Pour éviter une éjection mortelle, il a enfilé son harnais qui le relie au traîneau par une corde de cinq mètres. Il freine un peu des pieds jusqu’à ce qu’il perçoive dans son rétroviseur un groupe de masses sombres qui se précisent derrière lui, qui grossissent rapidement. Les loups l’ont déjà pris en chasse ! Enormes et nombreux… Plus question de ralentir !
A chaque seconde, le traîneau accélère dans la pente blanche; les horribles bêtes semblent inexorablement se rapprocher. Ça risque d’être juste…
La courbe arrive et Duncan actionne la dérive de droite. Le virage ne doit pas être trop serré afin d’éviter le basculement, ni trop large pour ne pas finir écrasé contre les rochers. S’il y a une chose que Duncan a bien apprise durant sa vie précédente, c’est que l’entraînement paie toujours et que quelles que soient les circonstances, il convient de savoir garder son sang froid ; ça, il l’a appris à ses dépens…
Le virage s’est bien négocié et c’est maintenant la longue ligne droite. Les loups se rapprochent toujours ; ils ne lâcheront pas et il le sait. Ces bêtes-là sont d’un entêtement égal à leur férocité ! Personne n’a jamais réussi à en domestiquer un seul ; ils préfèrent la mort à la capitulation. C’est probablement inscrit dans leurs gènes. Même à peine nés, ils se montrent agressifs envers l’homme et refusent de s’alimenter. Pas mal de types y ont laissé des doigts…
La pente défile et la pâleur de l’aube est remplacée par une lumière orange. Des cristaux de glace se sont formés sur les sourcils de Duncan et malgré l’épaisseur du tissu, l’air qu’il respire est très froid. Duncan se tasse le plus possible sur le traîneau car à cette vitesse, le moindre mouvement malheureux pourrait contrarier ses chances de réussite.
Curieusement, il constate dans le rétro que les loups se séparent en deux groupes ; un de chaque côté. Ces animaux sont doués d’intelligence ; ils savent que la pente va bientôt s’adoucir et que le traîneau va ralentir dans le rétrécissement plus bas et ils ne veulent lui laisser aucune chance de s’échapper. Ils veulent le gibier et le chasseur qui a osé s’aventurer sur leur territoire. Satanées bestioles !
Plus que quelques minutes avant de jeter le grappin. Le choc sera violent à cette vitesse-là et la neige sera dure…
Duncan empoigne la corne, la guide jusqu’à sa bouche en écartant le tissu qui recouvre son visage et souffle à pleins poumons à trois reprises pour prévenir de son arrivée imminente. Encore quelques secondes, quelques dizaines de mètres… Sa main a saisi le grappin… Cinq, quatre, trois, deux, un et le lourd grappin aux pattes larges est jeté par-dessus son épaule, très haut pour qu’il se plante correctement et profondément dans la neige.
Le ralentissement est tellement brutal que Duncan poursuit sa route dans les airs jusqu’à ce que la corde se tende et que le harnais lui comprime la cage thoracique avant qu’il ne retombe lourdement sur la neige.
Il est sur le dos, le souffle coupé et il fixe le ciel orange où courent de grandes masses nuageuses. Il entend le halètement des loups qui se rapprochent derrière lui, puis des cris aigus ainsi que des sifflements. Il ne doit pas bouger avant le signal. Les cris et les grognements se multiplient et puis tout redevient calme jusqu’à ce que le son d’une corne retentisse trois fois.
Il soupire et se redresse pour s’asseoir. Il jette un regard par dessus son épaule ; De nombreuses grosses masses sombres sont disséminées ça et là à quelques mètres derrière le traîneau, immobiles sur la neige, la fourrure hirsute flottant au gré du vent qui souffle doucement.
Il se libère du harnais et se lève. Il sort son coutelas de son étui et avance prudemment au milieu des cadavres des loups. Des hommes apparaissent, sortant de derrière les grands pins recouverts de neige; tous armés d’arcs et d’arbalètes. Ils le rejoignent, visiblement satisfaits. Un grand type maigre s’approche de Duncan et, la mine hilare lui tape sur l’épaule : « Jolie culbute Duncan ! Digne d’un homme-canon ! Pas de bobo ? Dis donc ! C’est un joli cerf que tu nous ramènes là…
– Non Vlad. Rien de cassé. Vous les avez tous eus ?
– Ouais. Tous. On est peinards pour un moment…
– Passe-moi tes jumelles…
– Tiens, bonhomme. Quelque chose t’inquiète ?
– Sais pas. Je ne vois pas le mâle Alpha. »
A travers les lentilles, Duncan scrute la neige en remontant le long de la piste et aperçoit l’énorme loup noir sur un promontoire. L’Alpha de la meute semble l’observer et il a l’impression qu’il le regarde droit dans les yeux en retroussant ses babines ; puis il disparaît brusquement sous les branches des sapins. » C’est un rusé celui-là… Faudra se méfier la prochaine fois.
– La prochaine fois, ce sera dans des mois ; il aura oublié. Tu leur prêtes bien plus d’intelligence qu’ils n’en ont réellement.
– Tu crois ? Mois je sais qu’ils apprennent et qu’ils s’adaptent. Ils se sont divisés en deux groupes vers la fin de la piste et le fait que l’Alpha se soit tenu à l’écart prouve qu’il se méfiait. Il est loin d’être idiot.
– Ce n’est qu’un loup. Allez, viens nous filer un coup de main pour les ramasser; t’as passé la matinée assis sur ton cul…
– Sale con ! La prochaine fois, tu monteras avec le traîneau et tu verras comme c’est reposant.
– Ce n’est pas moi le chasseur ; c’est toi. Allez grouille !
D’autres hommes sortent de la forêt et tirent des traîneaux plus longs et plus larges que le sien.
Vingt loups ont été tués. Leurs peaux et leur viande permettront au groupe de tenir quelques semaines au milieu de cette nature hostile.
Avant d’arriver ici, Duncan faisait partie des troupes d’élite. Il avait intégré l’académie dès ses sept ans et avait rapidement progressé dans tous les domaines. A ses dix-huit ans, compte tenu de ses résultats, de ses aptitudes et du statut de son père au sein de la Guilde, il avait pu choisir le corps où il allait servir : Les Troopers.
Il y avait rapidement trouvé ses marques et gravi les échelons. Quand on l’a promu au grade de capitaine, on lui a confié une équipe constituée et des missions excitantes.
Lui et ses hommes ont foulé le sol de mondes incroyables et se sont battus contre des créatures aussi féroces qu’étranges.
Ses succès ont été remarqués et il aurait dû faire une carrière extraordinaire et probablement finir officier général comme l’était devenu son père, si fier de lui.
Mais la vie ne se déroule pas forcément comme on l’avait prévu. Et quand la politique se mêle des affaires du militaire, ça ne fait pas toujours bon ménage…
Lors de sa dernière mission, la Guilde les avait envoyés, lui et ses hommes sur CENTAURI-255pour y conclure un accord avec les KRANS. Un traité commercial et de paix pour obtenir des droits de forage minier au bénéfice de la Guilde ; le sol de la planète recelant un curieux métal aux propriétés étranges.
Les KRANS, peuple pacifique et attachant, étaient partants pour signer un tel accord, mais voulaient négocier certaines conditions. La signature se serait obtenue en quelques semaines sans difficultés. Duncan était confiant et adressait chaque jour un rapport positif sur l’avancée des négociations.
Tout se déroulait au mieux jusqu’à ce que le Prime-Général des Troopers, le général Kuntz, resté en orbite autour de la planète sur le vaisseau amiral lui adresse un message flash ordonnant d’ouvrir immédiatement les hostilités sur CENTAURI-255et de détruire toutes les infrastructures des KRANS.
Désappointé par un tel message, Duncan avait immédiatement répondu par le même mode de transmission en demandant de confirmer de tels ordres alors que les négociations aboutissaient.
Kuntz n’avait pas répondu. Il avait quitté sa position orbitale et avait immédiatement commencé à pilonner les villes KRANS.
Sur Centauri 255, c’était devenu l’enfer et il s’en était fallu de peu pour que Duncan et ses hommes ne périssent sous le feu du vaisseau amiral.
Ce qu’ignorait Duncan, c’est que le Prime Général avait des ambitions politiques et qu’il s’était aventuré auprès du Feld ministre Paulus pour lui promettre le rapide succès des négociations sur CENTAURI-255et qu’en retour, il attendait son aide pour entamer une carrière politique au sein de la Guilde.
Le Feld ministre, connaissant les KRANS, savait que l’accord se signerait sans problème ; mais il savait aussi que ces êtres avaient une sainte horreur de la précipitation et qu’ils aimaient prendre leur temps.
Ce qu’ignorait Kuntz, c’est que Paulus le considérait comme un imbécile orgueilleux et qu’il ne voulait surtout pas de lui comme décideur à la Guilde.
Le Feld ministre avait donc imposé au Prime général un délai impossible à tenir comme condition sine qua non pour lui apporter le soutien espéré à sa démarche afin d’accéder à la fonction politique qu’il visait.
Constatant que les KRANS ne signeraient jamais l’accord minier à la date imposée par le Feld ministre, Kuntz avait alors opté pour la manière forte ; quitte à tuer ses propres hommes. La fin justifiant les moyens…
La délégation formée par Duncan et ses hommes avait juste eu le temps de quitter le sol en flammes de la planète pour rejoindre le vaisseau amiral.
Furieux, il avait exigé une audience auprès de Kuntz pour obtenir des explications. Lors de cette entrevue, le Prime général s’était montré méprisant à son encontre et les avait qualifiés de quantité négligeable, lui et ses hommes. Quant aux KRANS, ils ne valaient pas la peine que la Guilde perde son temps à négocier avec d’aussi insignifiantes créatures sans importance.
Duncan n’avait pu contenir sa colère ; il s’était alors jeté sur Kuntz et l’avait frappé à plusieurs reprises. Devant témoins…
Quand la Guilde a appris ce qu’il s’était passé sur Centauri 255, Le Prime général a été démis de ses fonctions, de son grade et emprisonné. Duncan pensait que justice était faite jusqu’au moment où la police de la Guilde est venue le chercher chez lui aux aurores et l’a enfermé, menottes aux poignets, sur ordre du Feld ministre à bord d’un vaisseau policier qui allait l’éjecter plus tard dans une capsule sur la planète carcérale JAIL314, revêtu d’une épaisse parka, de bottes en peau et de moufles.
Cette planète JAIL314, les détenus l’ont baptisée « PERPETA » en raison du fait que si la Guilde y dépose des gens, elle ne revient jamais les chercher. On y vit et on y meurt. C’est en quelque sorte l’oubliette de la Guilde ; pratique et discrète.
PERPETA est une planète où il fait toujours froid. A peine quelques degrés d’écart entre le jour et la nuit. Les êtres qui y vivent se répartissent sur une bande de quelques milliers de kilomètres de large sur une seule face de l’astre ; celle qui est exposée au soleil. La planète ne tourne pas sur son axe, pas vraiment. Elle oscille sur une trentaine de degrés et revient ensuite dans l’autre sens. Lentement. Et le soleil en question n’est pas très puissant ou est trop loin pour que l’atmosphère ne puisse s’élever au-delà de quelques degrés au-dessus de zéro dans la journée. Il fait suffisamment chaud pour que la glace fonde, que l’eau ruisselle et que la vie se maintienne. Il n’y a qu’une saison.
La population humaine de PERPETA n’est composée que d’hommes. Des condamnés. Il existe peut-être une autre planète carcérale dédiée aux femmes. Mais ça, personne ne le sait ; mais ça paraît logique. La Guilde a probablement choisi ce système de non mixité pour éviter les problèmes de surpopulation.
Au début, Duncan a très mal réagi. Il s’est laissé abattre. Passer du statut de capitaine chez les Troopers pour se retrouver parmi les condamnés de la Guilde sur une planète inconnue et froide…
Il serait sans doute mort si Vlad ne l’avait pas secoué et ne l’avait pas aidé à prendre sa place au sein de cette étrange société.
Sur PERPETA, il y a de tout. Des voleurs, des assassins et surtout des types qui n’ont commis comme crime que de gêner un haut responsable de la Guilde.
Ici, pas de place pour les fous furieux, les violeurs ou tueurs d’enfants.
Quand les capsules atterrissent, les captifs ont autour du cou un collier métallique sur lequel est gravé leur crime. Le collier ne peut s’enlever qu’au bout de six mois terrestres. Sur celui de Duncan, il y avait écrit « Mutin ». Ça avait fait rire les types qui étaient venus le récupérer. Quant aux capsules, elles sont source de métal et de bien des matériaux utiles au camp.
« Mutin », dans l’échelle des crimes répertoriés sur PERPETA se trouve être au ras des pâquerettes… Et face à des gars qui ont détourné des millions de shèks à la banque principale de la Guilde, d’autres qui ont tué, qui ont attaqué des fourgons de transports de fonds, des faussaires ou des opposants politiques ou des barons du crime organisé, « Mutin » ne fait pas sérieux !
Les pervers ne survivent pas ; ils sont éliminés dès leur arrivée après l’interrogatoire que subissent tous les nouveaux ; au cas où la Guilde graverait à tort un crime ne correspondant pas à la réalité des faits.
Durant son interrogatoire, Duncan avait expliqué ce qui s’était passé sur CENTAURI-255et avait avoué qu’il ne comprenait pas pourquoi on l’avait condamné pour mutinerie.
Quand six mois plus tard Kuntz était à son tour sorti hagard de sa capsule sur PERPETA, équipé d’un collier où était gravé « Forfaiture » Duncan avait demandé à participer à son interrogatoire, il avait alors compris la raison de sa présence sur la planète prison. Le Feld ministre craignait que le massacre des KRANS lui soit finalement reproché et il avait alors éliminé ceux qui auraient pu le compromettre. Tout ça à cause de la bêtise de Kuntz.
La colère de Duncan s’était alors transformée en une terrible haine pour son ancien supérieur hiérarchique.
Kuntz avait perdu de sa superbe, de sa morgue. Au camp, tout le monde savait qui il était auparavant, ce qu’il avait fait aux KRANS et pourquoi il l’avait fait. Les gens lui crachaient à la figure et toutes les corvées les plus ingrates étaient pour lui.
Au bout de trois mois de maltraitance et d’humiliations, la haine de Duncan s’était muée en pitié et il avait finalement demandé aux anciens de donner une chance à Kuntz de se racheter.
La vie au camp n’est pas désagréable, pourvu que l’on respecte les règles et que l’on n’y soit pas seul.
Vlad y est depuis longtemps. Pour trafic de stups. Il ne regrette rien et avoue même qu’il se sent mieux sur PERPETA que dans le monde de la Guilde. Ici, il a sa place, son importance.
Les premiers arrivés sur cette planète sont appelés pompeusement les « colons ». Ce sont eux qui ont bâti le camp et en ont fixé les règles immuables. Ils ont dû en baver… Entre le froid et les animaux sauvages.
La Loi ici est simple : Interdiction de tuer un humain, interdiction de voler qui que ce soit et enfin, être utile au groupe.
Quiconque enfreint l’une de ces règles se retrouve banni du camp pour une période de six mois terrestres… Autant dire que cela revient à une condamnation à mort, seul sans moyen de chauffage, sans vivres et exposé aux bêtes qui pullulent dans la forêt.
Des animaux qui, hormis les loups et les cerfs, ne sortent que rarement en plein jour, fuyant la présence humaine. Certains racontent que dans les fins fonds de la forêt se cachent des monstres hideux et féroces ; des créatures gigantesques aux griffes et aux dents acérées.
Dans un recueil, les colons ont réalisé des croquis représentant d’inquiétants animaux. Les anciens affirment qu’ils existent et se tiennent à l’écart du camp, dans l’ombre de la végétation.
Vlad a confessé à Duncan qu’il avait aperçu un jour, alors que les loups l’encerclaient, une masse gigantesque s’approcher au milieu des arbres et que les loups avaient fui. Et quand elle était repartie, il avait pu suivre sa progression en observant les cimes remuer sur son passage. Il a aussi affirmé que la créature avait poussé un horrible cri qui l’avait effrayé. Vlad avait échappé aux loups grâce à elle.
Le camp est circulaire et bordé d’une ceinture d’énormes pieux en bois plantés dans le sol. A l’intérieur, des baraquements rudimentaires en rondins se succèdent, où s’entasse la centaine de pensionnaires.
Certains pensent que d’autres camps existent sur PERPETA. C’est bien possible. Personne n’est jamais revenu des expéditions d’exploration…
La hiérarchie sur PERPETA se résume à l’ancienneté et aux talents particuliers. Le chef du camp se nomme Raingold. Un criminel en col blanc qui fait partie des plus anciens. Doué d’une intelligence supérieure à la moyenne, il s’est rapidement imposé comme leader et tout le monde respecte sa position. On raconte que Raingold avait su mettre au point un mécanisme de détournement de fonds dans les logiciels de la banque principale de la Guilde et que ça fonctionnait parfaitement. Son enrichissement et celui de ses complices a duré quelques d’années. Il a fonctionné jusqu’à ce qu’il séduise la femme d’un de ses complices. Ce dernier a très mal pris la chose en découvrant Raingold et sa femme au lit au domicile conjugal. Il a dénoncé Raingold et sa combine.
On dit aussi que Raingold a amassé une fortune qu’il a réparti sur des comptes secrets que la Guilde n’a pas pu trouver et que s’il arrivait un jour à quitter cette planète, il vivrait comme un nabab jusqu’à la fin de sa vie…
Duncan s’est rapidement adapté à la vie du camp et ses idées, ses techniques de chasse lui ont valu une place assez intéressante dans la hiérarchie.
Pendant que le cerf et les loups se font dépecer, Duncan rentre dans son baraquement pour se doucher et se reposer. Ses côtes sont douloureuses ; le harnais devra être amélioré…
En entrant, il aperçoit Kuntz, assis sur un lit, la mine triste.
– Kuntz ! Qu’est-ce que tu fais ici ?
– Je… Je dois te parler.
– Allons bon ! Des remords ? Des regrets ?
– Oui, bien sûr, mais il y a autre chose… Au sujet de ton père.
– Mon père ? Qu’y a-t-il ?
– Je sais que j’ai déconné. Que j’ai commis des actes criminels impardonnables… Les KRANS… Mon Dieu ! Comment j’ai pu faire une chose pareille ? Je n’aurai pas assez du reste de ma vie ici pour expier ça…
– Ouais ! Mon père dans tout ça ?
– J’y viens… Quand la Guilde a appris ce que j’avais fait sur CENTAURI-255, j’ai été démis de mes fonctions et dégradé. Lors de mon procès, Paulus a insisté pour que je sois condamné à vie aux mines à l’autre bout de la galaxie. Mais ton père est intervenu et il a réussi à commuer ma peine pour que je la purge ici.
– Pourquoi ça ?
– Il m’a demandé de te délivrer un message…
– Je t’écoute.
– Tu sais que l’emplacement de PERPETA est tenu secret par la police de la Guilde ; ce qui arrange pas mal de salopards haut-placés. Je crois que ton père veut te localiser. Il m’a demandé de te dire que tu dois te souvenir de ce qu’il t’a appris à propos des oscillateurs et il m’a dit de te dire ce mot : « Everest ». Voilà. C’est ça le message.
– Les oscillateurs ? Et pourquoi ne pas m’en avoir parlé plus tôt ? Dès ton arrivée ?
– Parce que toi et les autres, depuis que je suis ici, vous m’avez humilié, craché à la figure et cantonné aux latrines, à nettoyer la merde de tout le monde pendant des semaines. Dans mon esprit, j’étais encore Prime général, tu comprends ? Je n’étais pas véritablement disposé à te rendre ce service. Et puis, j’ai fini par accepter mon sort. Je n’ai eu que ce que je mérite… Tous ces morts par ma faute.
– Et mon emprisonnement à cause de ta bêtise.
– Je sais. Je suis impardonnable.
– Impardonnable ? Tu sais, ici, tout le monde a commis des crimes. Et maintenant, tout le monde s’en fout de ce que tu as fait ; même moi. On ne peut pas vivre dans la haine ou le remord ; c’est un luxe au-dessus de nos moyens. Il faut avancer tous ensemble. On est tous coincés ici et il importe que nous fassions tout notre possible pour améliorer ce qui peut l’être. Pour ce qui te reste à vivre, tes meilleurs amis sont ici ; tu n’en auras pas d’autres. Fais en sorte qu’ils t’apprécient et tu vivras mieux. Tu devrais t’en aller. Ne parle de ce message à personne. »
Kuntz repart la tête basse, plus voûté que jamais.
Duncan s’assied sur son lit, pensif : » Les oscillateurs ? L’Everest ? » Il réfléchit un moment puis s’endort. Il rêve de son enfance, de son père qui lui a appris à construire…. » Une radio ! »
Il se réveille en sursaut. « Les émetteurs contiennent un oscillateur ! Et l’Everest ? Le sommet du monde sur Terre… Il culmine à… 8848 mètres ! Une radio calée à 8848Mhz ! C’est ça le message ! Il suffira d’émettre un bip régulier sur cette fréquence, il sera à l’écoute. Par contre, comment préparer une telle évasion sans éveiller les soupçons ? Hors de question de libérer de vrais criminels… »
On frappe à la porte et Raingold apparaît, seul sur le seuil, un petit sourire en coin : « Duncan ? Je crois que nous devons avoir une petite conversation tous les deux… A propos de ton père… Kuntz est venu me voir pour marchander un secret contre une vie meilleure. N’est-ce pas triste et désopilant à la fois ? Un homme de sa qualité, se laisser aller à de si basses manœuvres. On ne sait plus à qui se fier de nos jours, qu’en penses-tu ?
– Que t’a-t-il dit ?
– Il m’a confié que ton père voulait qu’on te parle d’oscillateurs et de l’Everest. A première vue, ça paraît absurde, voire incongru. Mais… En y réfléchissant un peu, je crois que si on montait, à partir des éléments des capsules un émetteur radio et qu’on envoyait un signal sur une fréquence de 8848Mhz, j’ai comme dans l’idée que général Papounet rappliquerait ventre à terre pour récupérer son rejeton chéri. Je me trompe ?
– Quel con ce Kuntz !
– Je suis de ton avis. Il est indécrottable… Mais tellement humain et misérable.
– Et donc ?
– Et donc, Kuntz vient d’avoir une promotion. Je viens de le bombarder « Prime général cureur de latrines en chef » ! Si tu avais vu sa tête… ça lui apprendra à cafarder.
– J’imagine que tout le monde va être informé ?
– Me crois-tu stupide ? Non ! Ce petit secret restera entre nous, bien évidemment. Je t’aiderai et en échange, je m’en irai avec toi. C’est le deal. Juste toi et moi.
– Et les autres ?
– Les autres ont tous pour la plupart du sang sur les mains, directement ou indirectement. Moi non.
– Un innocent ?
– Je ne suis pas une blanche colombe, Duncan. Mon crime était technique, il ne concernait que des transferts d’argent et je n’ai jamais tué personne.
– Comment comptes-tu m’aider ?
– En t’affectant au magasin pour une semaine ; le temps que tu assembles ta radio.
– Et ensuite ?
– Quand ce sera prêt, je monterai une expédition d’exploration et tu en feras partie, évidemment. Quand nous serons montés assez haut, tu pourras déployer ton antenne et déclencher la radio. La suite dépendra de ton père.
– Qui fera partie de l’expédition ? On sera combien ?
– J’imagine qu’un groupe de trois ou quatre fera l’affaire.
– Je crois que je n’ai pas trop le choix ?
– A ton avis ? Le magasin est à toi. Ne perds pas un instant. Il me tarde de quitter cet endroit épouvantable.
Quand Raingold a annoncé qu’il devenait nécessaire d’explorer les environs afin de déterminer s’il n’y avait pas de meilleur endroit pour construire un camp et, peut-être en découvrir un autre plus loin, l’assemblée des anciens en est restée médusée. D’une part parce que personne n’était jamais revenu des précédentes expéditions, et d’autre part tout le monde se souvenait que Raingold avait toujours affirmé qu’une telle entreprise relevait du suicide. Devinant le trouble, il a alors affirmé que seuls les imbéciles ne changent pas d’avis.
Il a ensuite précisé que l’expédition partirait dans les semaines à venir. Dès qu’il en aurait fixé les modalités et l’itinéraire…
Duncan s’affaire, enfermé dans le magasin. Il assemble les divers composants nécessaires. Il prélève des pièces sur les étagères, les démonte de leur support pour les disposer sur le sien. Monter la radio ne devrait pas lui prendre beaucoup de temps malgré l’absence d’électricité et il doit utiliser une mini forge pour chauffer une pointe métallique en guise de fer à souder ; pour l’antenne, des câbles mis bout à bout feront l’affaire et il suffira de grimper en haut d’un arbre pour la déployer. La radio ne sera pas un problème ; par contre ce qui l’inquiète, c’est Raingold. Qu’a-t-il vraiment en tête ? A-t-il l’intention d’embarquer d’autres personnes ? Est-il sincère ? Comment le savoir ? Une idée vient germer dans son esprit quand on frappe à la porte du magasin : « Duncan ? Ouvre, c’est Raingold ».
Duncan entrouvre la porte : « Entre. Que se passe-t-il ?
– J’ai annoncé que je prépare une expédition d’exploration. Il te faudra combien de temps pour monter ta radio ?
– Humm… Trois jours au maximum. Il y a tout ce qu’il faut, mais sans outil, c’est un peu coton.
– Je comprends.
– Qui nous accompagnera ?
– Je ne l’ai pas encore décidé.
– Et que ferons-nous quand ce sera le moment de monter à bord d’une navette ? Tu leur diras que tu es désolé mais que tu n’as que deux tickets ?
– J’y ai réfléchi. On séparera l’équipe en deux à l’approche du site que tu estimeras propice au déploiement de l’antenne. On attendra qu’ils s’éloignent et on installera la radio. Ça te va ?
– Mouais…
– Reprends-moi si je me trompe, mais il me semble sentir de la méfiance. Tu crois que je vais te jouer un sale tour ? Te laisser ici et embarquer avec d’autres gars ? Réfléchis ! Si je fais ça, que se passe-t-il ensuite ? La navette réintègre le vaisseau de ton père et… Oh ! Quelle malchance ! Ce n’est pas mon fils à bord mais des criminels inconnus ! Je ne crois pas qu’il nous adopterait.
– Je vous sais assez malin pour mettre au point un stratagème dans n’importe quelle situation.
– Duncan, Duncan… J’ai tout à gagner à respecter mon engagement et tout à perdre à le rompre. Tu vas devoir me faire confiance. Pendant qu’on y est, je compte sur toi pour faire passer la pilule de ma présence auprès de ton père quand on arrivera…
– J’essaierai.
– Je compte sur toi Duncan. Je ne voudrais pas qu’on me redépose ici. Je n’ose pas imaginer ce qui m’attendrait après ça… Moi, je te fais confiance ! Allez, au boulot !
C’est au petit matin que le groupe sort de l’enceinte du camp.
Raingold a choisi un grand type très costaud que Duncan ne croit pas connaître et qui se nomme Ted, et Vlad pour les accompagner. Deux gars doués pour la chasse et solides.
La présence de Vlad met Duncan mal à l’aise et quand il vient lui dire que cette expédition est très excitante, Duncan ne lui répond pas.
Le groupe progresse au milieu de la piste en silence. L’air est froid et la pente devient de plus en plus raide. Le sac à dos de Duncan pèse sur ses épaules ; le câblage pour l’antenne est assez lourd.
Ils sont armés de poignards et d’arcs et chacun d’eux prie pour ne pas rencontrer les loups en chemin.
Arrivés à la moitié de la piste, après les rochers et le virage, ils font une pause. Il fait un peu moins froid et le soleil est assez haut. Personne ne parle ; seuls des regards sont échangés. Après avoir bu un peu d’eau et mangé de la viande séchée, les hommes se relèvent et reprennent leur ascension. En silence.
Arrivés en haut de la piste, il y a un piton rocheux qu’il faut escalader. Pas moyen de le contourner. Après avoir observé la roche, une faille se dévoile, qui leur permettra d’accéder au sommet sans trop de difficultés.
L’ascension s’avère longue et épuisante. Les prises sont nombreuses mais la roche est glissante, humide et si verticale !
Raingold semble déborder d’énergie et grimpe avec une aisance étonnante. Vlad ne semble pas éprouver de difficultés. Par contre, Ted a du mal à se hisser ; il doit bien peser dans les cent kilos… Quant à Duncan, heureusement que son passé lui a forgé un corps robuste et endurant car son sac à dos lui semble peser une tonne. Il grimace en se hissant, les cuisses en feu.
Arrivés au terme de l’escalade, les quatre hommes s’allongent dans la neige pour reprendre leur souffle et récupérer de leurs efforts. Duncan s’assied et contemple le nouveau panorama qui s’offre à eux. Une vaste étendue neigeuse en pente douce court sur des centaines de mètres et se termine par une nouvelle forêt épaisse. L’endroit parfait pour installer la radio et faire atterrir une navette.
Duncan adresse un signe de tête à Raingold qui acquiesce.
Le groupe repart en direction de cette forêt.
Arrivés à l’orée, Raingold explique que le groupe se sépare en deux. Ted et Vlad vont partir sur la gauche et Duncan et lui sur la droite sans trop s’espacer.
Vlad et Ted obtempèrent sans poser de question ; ce qui intrigue Duncan. « Et si…? »
Raingold part à droite, suivi de Duncan et dès que les deux autres sont hors de vue, il se retourne : « C’est le moment… On installe la radio, vite ! Passe-moi le câble, je vais grimper à cet arbre, je ne suis pas fatigué. Allez ! »
Effectivement, Raingold grimpe facilement le long du tronc du grand résineux en tirant sur le câble. Et le fixe près de la cime, aussi haut que possible puis il redescend.
Duncan connecte sur son appareil une des batteries prélevées sur les capsules et branche l’antenne.
Raingold semble nerveux, en proie à une excitation grandissante : »Alors ? Ça marche ?
– Un instant. Je mets le contact ».
Quand Duncan lève l’interrupteur, un « CLIC » se fait entendre et une LED rouge clignote. « Ça marche.
– Tu es sûr ?
– Oui. On émet depuis que j’ai actionné l’interrupteur.
– Parfait ! J’espère que la navette ne mettra pas trop de temps…TED ! C’est bon !
– Que fais-tu ?
– Tu vas devoir me pardonner. Ted est un très bon ami qui sait piloter. Il m’est indispensable et très dévoué.
– Donc, tu as finalement décidé de partir avec Ted et de me laisser ici.
– Pas vraiment. Tu vas venir avec nous, mais… Pas en vie, malheureusement. Ce qui nous permettra de raconter une belle histoire à ton père qui nous sera reconnaissant d’avoir voulu t’aider et d’avoir tenté de te sauver la vie ; en vain évidemment et de lui rapporter ton corps ».
Ted revient tranquillement tout en essuyant la lame dégoulinante de sang de son poignard sur sa cuisse.
– Vlad ? Vous l’avez tué ? Pourquoi ?
– Les témoins sont comme les mycoses ; ils sont très gênants.
– Je me doutais bien que tu ne respecterais pas ta parole.
– Oh ! Vraiment ? Tu me fais de la peine…
– Oui. Et c’est pour ça que tu peux attendre la navette longtemps. Elle n’arrivera jamais.
– Et pourquoi ? La radio, elle fonctionne ?
– Oui. Mais pas sur la bonne fréquence. Et bien malin celui qui pourra la régler !
– Petit fumier !
– De ta part, ça ne peut être qu’un compliment…
– Salo… »
Raingold vient d’ouvrir de grands yeux ainsi que sa bouche qui reste figée comme pour former un « O ». Une flèche vient de le transpercer au niveau du thorax. Il tente de s’accrocher au tronc d’arbre mais ses mains n’ont déjà plus assez de force et il s’écroule mort.
Au moment où Ted réalise ce qui vient de se passer, il se retourne et l’arrière de son crâne explose sous l’impact d’une autre flèche.
Duncan court en direction de l’origine des tirs : « Vlad ! Vlad !
– Ici… Je suis là… »
Vlad est assis contre un arbre, les mains pressant son ventre. Du sang s’écoule abondamment, épais, de sa parka, entre ses doigts. Duncan tente de le relever mais il refuse de bouger : « Non… Pas la peine… C’est con, hein ? Pourquoi… il a fait ça ? On ne saura… jamais ce qu’il y a plus loin… C’était… pas si mal… »
Vlad a cessé de respirer, son regard est devenu flou et sa tête est doucement tombée sur sa poitrine.
Duncan reste un moment immobile devant la dépouille de celui qui fut son ami sur cette maudite planète. Un bon chasseur et un archer hors pair. « Adieu Vlad… »
Il ouvre le boîtier de la radio et déplace les petits picots qu’il a sélectionnés pour obtenir la bonne fréquence d’émission. « Pourvu que les secours arrivent vite. Tout ce sang… ça va attirer les prédateurs ». Il grimpe à un arbre pour attendre la navette dans une relative sécurité, écoutant les bruits de la forêt sans détecter quoi que ce soit. Aucun bruissement, aucun grognement. Tant mieux !
La navette apparaît bientôt dans le ciel et descend doucement pour se poser sur la neige à une cinquantaine de mètres de Duncan, toujours perché. Son cœur s’emballe, c’est bientôt la fin de son exil sur cette satanée planète. Il va bientôt pouvoir reprendre une vie normale après qu’il aura dit la vérité au sujet du Feld ministre. Justice lui sera bientôt rendue…
Le SAS de la navette s’ouvre et… Son père apparaît. Il est venu le chercher en personne ! Il est accompagné par des gardes armés qui scrutent les alentours.
Duncan sourit et lance un appel à son père : « Hé ! Je suis là Papa ! J’arrive dans un instant ! Merci ! » Et quand il se penche pour saisir une branche, des détonations claquent. Plusieurs coups de feu. Et des cris de douleur et d’effroi lui parviennent aux oreilles.
Il se redresse et une vision d’horreur lui apparaît : Les gardes et son père sont au sol et baignent dans une mare de sang qui colore la neige. Les loups ont surgi de nulle part et ont mis tout le monde en pièces. L’Alpha ressort de la navette, bien plus gros que les autres loups et son museau est ensanglanté. Il s’approche du cadavre du père de Duncan, le renifle et d’un coup de mâchoire le décapite. Il lève la patte et urine sur le corps mutilé avant de redresser la tête et fixer Duncan droit dans les yeux. Toutes babines retroussées.
Duncan, perché sur son arbre, porte ses mains à sa tête : « Nooon ! Non ! Papa ! Il ne t’avait rien fait… »
Les loups repartent et disparaissent aussitôt dans la forêt.
PERPETA s’appelle ainsi car quand on y arrive, on y vit et on y meurt…